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Révolutions arabes : "Aller à l’idéal mais comprendre le réel"

Rédigé par Jean-Pierre Chevènement le 16/03/2011 à 15:59 | Lu 3567 fois

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L’évolution de la situation en Libye met en valeur l’improvisation "bernard henri-léviesque" à laquelle le Président de la République s’est laissé aller en reconnaissant non pas un Etat mais un gouvernement, chose radicalement nouvelle dans la tradition diplomatique française. Il eût été prudent de s’assurer que le « transfert de légitimité » ainsi opéré correspondait bien à une inversion du rapport de forces sur le terrain que seule pouvait garantir une intervention extérieure potentielle (zone d’exclusion aérienne) dont les conditions n’ont jamais été réunies.

Le Président de la République repoussait, à juste titre, l’idée d’une intervention de l’OTAN mais c’était au bénéfice d’une intervention franco-britannique : il était sans doute bien jeune au moment du « coup de Suez », mais il semble avoir oublié que celui-ci n’a pas laissé que de bons souvenirs dans la région…

La communauté internationale ne peut agir qu’avec le soutien des pays arabes et notamment de l’Egypte pour contenir la violence exercée par le régime du Colonel Khadafi à l’égard de son peuple. On peut regretter l’irrésolution de la communauté internationale mais c’est toujours une erreur de mettre les orientations de notre diplomatie sous l’Empire de la Communication.

Que M. Bernard Henri-Lévy lance, dans la tradition de Malraux, des brigades internationales pour Benghazi, c’est son affaire ! Mais que la France s’isole au plan international en brandissant un sabre de bois est un faux-pas infiniment plus grave. On ne semble pas s’être avisé, en haut lieu, que, dans ce qu’il est convenu d’appeler « les révolutions arabes », le comportement de l’armée est décisif. En Tunisie comme en Egypte, elle a refusé de tirer sur les manifestants. Ce n’est pas le cas partout ailleurs. Chaque pays a une situation spécifique dont il serait opportun de s’aviser avant d’appeler inconsidérément des citoyens justement épris de démocratie à verser leur sang.

« Aller à l’idéal, mais comprendre le réel » disait Jaurès.


(2) Commentaires
1. Pascal Olivier le 17/03/2011 23:43
Voilà toute la différence entre un homme d'Etat, Jean-Pierre Chevènement , et un bateleur, Nicolas Sarkozy. "Un clown" a dit le fils de Mouaamar Kadhafi, Saïf el Islam (l'épée de l'islam) . J'ai traduit son prénom parce que les vocables en arabe qui pourraient donner une image négative de l'islam sont rarement traduits. Jamais je n'ai entendu le mot "phalanges" pour les islamistes algériens qui portent pourtant le nom de kataëb.

Bernard-Henri-Lévy est fidèle à lui-même, toujours présent dans les mauvais coups où il s'agit d'installer des satrapies islamiques. Après l'Afghanistan et les Balkans, il en pince pour l'Emirat islamique de Cyrénaïque . Ce n'est pas pour défendre les coptes en Egypte que BHL lancerait des brigades internationales !

Eh bien si Jean-Pierre, l'armée Egyptienne garante de la "révolution" a tiré en Egypte. Elle a tiré sur des moines coptes et a attaqué deux monastère des IVe et Ve siècles avec des tanks ! Leur crime : avoir érigé une clôture pour se protéger des pillards après que l'armée ait prétendu ne pas avoir les moyens de les défendre.

http://www.islamisation.fr/archive/2011/02/23/egypte-des-monasteres-encore-attaques.html

J'avais écrit le 13 février dernier que le baromètre en Egypte serait le sort réservé aux coptes ainsi que celui réservé au principe constitutionnel égyptien selon lequel la charia est la principale source du droit, que l'on verrait bien si la condamnation à la mort civile des apostats (notamment la dissolution du mariage et l'ouverture de la succession du condamné) perdurerait, sachant que les islamistes ne trouvent pas suffisante cette mort civile.

En attendant la nouvelle mouture de la constitution, nous avons déjà une réponse en ce qui concerne les coptes, l'armée en est toujours à l'application du pacte d'Omar (717).
2. Pascal Olivier le 21/03/2011 22:18
La charia vient d'être approuvée en Egypte par référendum avec 77% des suffrages exprimés. L'article 2 de la Constitution égyptienne faisant de la charia la source principale du droit est maintenu dans la nouvelle mouture de la Constitution.

Petit rappel historique : la charia était l'une des sources du droit et non pas la source principale du droit avant la modification référendaire de 1980. La "révolution" du 25 janvier n'aura même pas permis d'effacer cette régression trentenaire.

"Relève ton front mon frère !" C'est plutôt la soumission que le peuple égyptien a choisi comme le laissaient présager, sur la place Tahrir, les obscènes prosternations en direction de la Mecque.

Margaret Scobey, ambassadeur des Etats-Unis au Caire, s'est félicitée de l'approbation de la réforme, qu'elle a présentée comme "un pas important vers la réalisation des aspirations de la révolution du 25 janvier".

L'ordre impérial islamo-américain dans toute sa splendeur !

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